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Photo du rédacteurLouise Perriard

Derniers coups de pédales - Cafayate

Premiers coups de pédales de la journée en direction de Cafayate. C’est le troisième jour où tout est fermé d’affilée entre le dimanche et les jours fériés. Je réussis par miracle à trouver un magasin ouvert pour faire les ultimes provisions. C’est une relativement grande ville et sortir de la zone urbaine prend du temps. Arrivée en bordure et dans un quartier manifestement très pauvre, je roule à pleine vitesse sur un nid de poule rempli d’eau dont je ne vois pas la profondeur. PAF. C’est mes deux chambres à air qui crèvent ensemble et pour la première fois du voyage. Fallait bien que ça arrive, je savais que je n’y échapperai pas sur les derniers jours. Au vu du bruit, j’ai très peur que mes pneus aient explosé. En panique, j’appelle Joïa qui me confirme que tous les magasins de vélo de la ville sont fermés. Bien, on se reprend. Je me calme et me décide à changer les chambres à air en espérant que cela suffise, car je n’ai pas de pneus de rechange. Je ne suis pas très à l’aise de faire ça dans ce coin, ça craint vraiment. Un type sort de chez lui et se décide à me regarder faire, tout le long. Un second voisin le joins à sa contemplation. Ça me rend folle ces vieux mecs bizarres qui me regardent faire. Au moins, ça me motive faire ça vite. Une heure plus tard, Alba revit et j’ai le poids de deux chambres à air en moins à porter.



Je réalise que je me suis trompée de route, j’étais pas censée passer sur ce nid de poule en fait. J’ai beaucoup de peine à retrouver mon chemin et passe par des quartiers de plus en plus pauvre et avec des regards de plus en plus insistants. Je suis super tendue, on me siffle sur la route, c’est pas marrant. Je retrouve finalement la piste cyclable (et si !) pour rejoindre la route 68 qui m’emmènera à Cafayate, destination finale de mon voyage à vélo. Je m’autorise enfin à poser pieds pour manger un bout étant sortie des quartiers chauds. Quelle matinée… Je finis par trouver la route 68 et retrouve le trafic, incessant. On me klaxonne à tout va, pour diverses raisons, mais la plupart du temps, c’est pour « m’encourager ». Bon, les klaxons, c’est sympa une fois, mais c’est vite fatiguant. Les gros camions passent proches de moi, les bus aussi : Tristan et Joia m’avaient prévenu, y’a du traffic les 50 premiers kilomètres. Espoir donc, car ça devrait aller en diminuant ! Je m’approche de plus en plus de la campagne et traverse un village. Un mec me crie quelque chose comme « hey », plusieurs fois. Toujours tendue de ma matinée compliquée, je tente la plus ou moins efficace technique de « j’ai rien entendu ». Le mec me poursuit sur son vélo et ça me fait un peu flipper. Je m’arrête, prête à m’énerver et le mec commence à me débiter toute sa vie en m’expliquant qu’il adore les cyclistes et qu’il en accueillent souvent, qu’il est warmshower et que je suis la bienvenue pour l’assado (barbecue) qu’il est en train de cuisiner. ça alors. Poursuivre des gens à vélo en leur criant dessus ne me parait pas être la meilleure approche pour mettre en confiance l’autre, m’enfin… Il a l’air en fait très sympathique, mais je n’ai aucune envie de discuter avec des gens à ce moment-là, encore stressée de cette course-poursuite. Il y a des moments où j’aurais rêvé qu’on m’invite comme ça, mais à ce moment là, vraiment, mais vraiment pas. Je le remercie donc et retourne sur ma route. Je retrouve de plus en plus le calme et qu’est-ce que ça fait du bien !


La campagne défile et je retrouve le vert, les arbres, les champs. C’est vraiment chouette ! En fin de journée, je croise un cycliste et découvre un petit drapeau breton derrière : c’est sûr, je peux parler français. Je rencontre donc Pierre qui est parti en janvier d’Ushuaia et qui monte…jusqu’en Alaska. On s’arrête sur le bord de la route et on s’échange des informations sur nos routes respectives. ça discute voyage, mais il est temps de se quitter, car le soleil descend et on doit chacun se trouver un endroit où camper.


Au kilomètre septante, je réalise qu’il n’y a pas vraiment d’endroit où camper à part un camping à 4,5km de détour. Pourquoi pas ! Et dormir dans un camping me permet d’être sûre ou presque de ne pas avoir d’animaux bizarres tels que serpents ou autres entrant dans ma tente qui ne se ferme pas. C’est un camping super cher pour la région, mais j’ai au moins tout ce qu’il me faut. Au réveil, je remonte mes 4,5km de la veille, passe par la Boulangerie du village et rejoins la route 68. J’ai rejoins la belle partie de la route, normalement, c’est que du bonheur à partir d’ici ! Et en effet, la route ne devient que plus belle au fil des kilomètres. Je m’arrête déguster un excellente tarte aux légumes dans un petit restaurant au bord de la route et repart sur cette route ensoleillée.



Je rencontre un autre cycliste allant au nord. C’est un chilien qui s’appelle Diego. On a une conversation complètement dingue ; je lui explique que je suis partie de Punta Arenas et il réagit tout de suite en me disant que c’est de là où il vient ! Rencontrer un Chilien de Patagonie en dehors de la Patagonie, c’est tellement rare ! Quand il enlève son pull, je découvre son t-shirt de foot notre très chère équipe nationale. Et un chilien qui porte une équipe suisse sur son dos, c’est d’autant plus rare, croyez-moi, sortant quand le pays voisin est champion du monde et qu’on s’y promène à vélo. Bref, on se marre bien et on se souhaite bon vent.








J’entre enfin dans la fameuse Quebrada de las Conchas, des canyons rouges et des cactus à perte de vue, c’est ce qui m’attend sur les quatre-vingt prochains kilomètres. C’est superbe ! Je croise renards et ânes et profite des très beaux paysages. Je peux admirer les condors qui volent en cercle sur le sommet des montagnes, merveilleux. Pour camper, plus compliqué. IOverlander regorge de spots de campings…mais y accéder est une autre affaire. J’abandonne et me fraye mon chemin au milieu des cactus et des épines et ce, sans crever : un vrai miracle. Je plante la tente entre deux épines de cactus et trois chardons et prie pour ne rien percer. La tente perdra un peu de tissus en-dessous malheureusement…mais c’est mon dernier spot de camping du voyage !







Une scène d'un des films de Renato Salvaje a été tournée ici (voiture brulée) : c'est connu mais je connais pas




Je ne dors pas très bien, étant vraiment flippée qu’un scorpion vienne me réveiller cette nuit (tente toujours pas réparée donc), car je sais qu’il y en a plein la région. Le matin, je me réveille entière, tout va bien. Je plie bagage pour la dernière fois et retrouve la route, toujours sans crever (wow).


C’est mon dernier jour de vélo du voyage. ça fait très bizarre, mais ça me parait aussi bien ; je me réjouis beaucoup (beaucoup) de rentrer, car voyez-vous, la fondue me manque (et ma famille et mes amis, accessoirement ;)).




C’est une très belle journée et les paysages sont vraiment merveilleux. Je m’arrête souvent prendre des photos et je n’ai que 55-60km à faire pour arriver à Cafayate.



Je profite de ce qui m'entoure et m’arrête aux points de vue touristiques. On me pose beaucoup de questions, le drapeau suisse fait toujours autant sensation. Arrivée à l’amphithéâtre, un canyon naturel, les touristes me regardent avec de plus en plus d’insistance. C’est pas très agréable. En fait, c’est pas très agréable du tout. J’ai l’impression d’être dans un zoo, mais du mauvais côté. ça se chuchote des choses en me regardant… Bref, je ne fais pas long sur les lieux et préfèrent les points de vue auxquels seules Alba et moi avons accès en bord de route. Je rencontre tout de même des suissesses qui viennent me parler à l’un de ces spots touristiques. Elles viennent de Lucerne et massaient de questions. Avec elles, un anglais ; il parle français ayant vécu à Lausanne. Tout se beau monde s’en va pressé : leur bus va repartir.



Je me remets aussi en route et tente de réaliser qu’il s’agit de mes derniers coups de pédales.


Le soleil m’accompagne et je peux me mettre en birks et short pour terminer. Si c’est pas le bonheur ça, je sais pas ce que c’est. A quelques kilomètres de Cafayate, je croise un couplée cyclistes. Ils sont bretons (décidément !) et font Ushuaia-Lima. On discute un moment et Damien me propose de me prendre en photo pour marquer le coup. J’y aurais même pas pensé ! On se dit au-revoir après cette petite séance shooting et j’entre dans Cafayate, entourée des vignes et d’un tapis de feuilles mortes. C’est fini.






Fini, pas tout à fait, car il me manque un peu moins de dix kilomètres pour atteindre les 3000km sur komoot. Je vais qu’en pratique je les ai déjà dépassés, mais je veux le chiffre sur l’application. Cafayate se résume donc ainsi : 10km de vélo d’errance à résoudre des problèmes administratifs (trouver une boîte à vélo, un service d’envoi etc.) et boire du vin.


Je rencontre un couple de français qui vadrouillent depuis plusieurs mois et on s’en va boire des bières. D’autres français qu’ils ont rencontrés en voyage s’ajoutent à nous (par hasard) et l’heure du coucher se retarde. Autres verres de vin et re-rencontre de l’anglais Lausannois avec des anglophones cette fois. Une américaine est dans l’équipe et elle me pose des questions débiles sur mon voyage : j’ai plus la patience de répondre à ces questions, décidément. (On était quand même sur du « doesn’t it hurt your vagina when you cycle ? » et autres questions de ce niveau). Les autres sont super chouettes et je tâche de ne pas trop écouter ma voisine de gauche. Le lendemain, c’est le grand jour de stress : je veux emballer le vélo, lui faire un service et l’envoyer à Buenos Aires par un service postal. Voyez-vous, je souhaite prendre la route pour Iguazu sans Alba et finir en beauté le voyage. Spoiler alert : ça se passera pas comme prévu.


Mais ma chance n’a pas encore tourné et j’arrive à faire, est ça relève du miracle, tout ce que je veux faire. Le vélo est dans un carton à 12h30 et à 14h, il est scanné pour être envoyé à Buenos Aires en camion avec tout le reste de mes affaires. Bon voyage Alba, prends soin de toi ! Pour ma part, je n’ai pas le choix ; je dois retourner sur Salta pour prendre deux autres bus afin d’arriver à Iguazu. C’est loin, mais je crois bien que ça vaut le coup. Arrivée à Salta, c’est le désenchantement puisque le mec des billets de bus m’annonce que tous les bus pour Corrientes sont partis 15’ avant. Je n’ai pas le choix, je dois dormir à Salta. Mais c’est un mal pour un bien, car ça me permet de retrouver Pierre le breton rencontré sur la route et Damien, l’autre breton rencontré sur la route. Au programme cette fois : des bières, et encore d’autres bières. On passe une super soirée.



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2 Comments


Yves Perriard
Yves Perriard
Jul 05, 2023

Moi j'aime cette phrase : c'est connu mais je connais pas ! lol

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mais ces rencontres...! Mais ces questions!

Je ne sais pas comment tu as pu dormir la tente ouverte avec toutes les bestioles qui auraient pu y rentrer 😱😱😱

Fondue au programme, c'est noté 😁

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