À Téhéran, on retourne quelques jours à notre auberge, histoire de se reposer de ces derniers jours intenses. Stephan reprend toutefois sa route le lendemain, sur son vélo. Tobi est un peu malade et moi je veux juste chiller. On ne sort pas de l’auberge (sauf pour nos jus de fruits et glaces au safran bien sur) et deux jours plus tard, je prends le bus avec Tobi en direction de Kashan.
La veille, Tobi téléphone à sa copine, j’entends qu’il essaie de la rassurer et c’est quand il lui dit que c’est safe qu’on entend un coup de feu depuis l’auberge. Il est temps de partir.
On prend donc le bus, galérons à comprendre lequel est le bon et nous nous faisons offrir le thé du chauffeur, étant assis juste derrière lui. Google maps nous ayant menti, nous arrivons plus tard que prévu. À notre nouvelle auberge, nous retrouvons les deux suisse-allemands déjà rencontrés à l’auberge de Téhéran : Lukas et Patrick. Nous resterons entre suisses quelque jours.
Kashan est une ville apaisante. Il n’y a pas de manifestations, c’est une petite ville et l’on est proche du désert. Nous oublions (presque) tout des horreurs de la capitale. Nous rencontrons un autrichien trop sympa ainsi qu’une famille de français qui voyagent à vélo (avec deux loulous tout jeunes !).
Kashan est notre petit paradis.
Le premier soir, trouvant comme toujours dur de trouver un restaurant, notre fine équipe demande conseil à des passants. On se retrouve ainsi en taxi devant le restaurant recommandé : fermé. Nous demandons donc à notre chauffeur de taxi de nous trouver un endroit où nous sustenter. Il est ravi et nous conduit à des kilomètres de la ville. Nous tentons de l’arrêter, sans succès. Nous sentons l’arnaque arrivée, ça va nous coûter une blinde. Au moment de payer, il nous demande 50’000 rials, quelques centimes. Je suis abasourdie et m’excuse intérieurement de l’avoir ainsi faussement jugé. Le restaurant, par contre était un guet-apens. Nous avons payé plus de trois fois le prix normal d’un repas ici. Peu importe.
N’empêche, ce restaurant nous aura valu bien des fous rires. En arrivant, la carte était évidemment en farsi et comme internet était coupé, on ne pouvait pas traduire le menu. . Il nous a demandé d’abord ce que l’on préférait “chicken or meat ?”.
Nous avons demandé à notre serveur ce qu’il avait. Celui-ci ne connaissant apparement que peu l’anglais nous répétait “neck, neck !” en nous montrant son cou. -“Et vous avez autre chose ?” -“neck !”.
Nous avons donc pris 4 necks. J’étais pas très convaincue par l’idée mais enfin…
Quand Patrick a demandé s’ils avaient des légumes, il nous a dit que non. Puis, il nous a proposé à chacun une salade. Fou rire encore.
On a ensuite commandé quatre bouteilles d’eau. On en a reçu trois ainsi qu’une sorte de virgin mojito. Fou rire encore.
On était donc tous bien fatigués, puisqu’on arrivait clairement pas à se reprendre.
Ensuite nos necks sont arrivés et c’était tout à fait aux goûts des suisse-allemands, moins du mien. J’en avais marre de la viande et ça me dégoûtait un peu. La viande était trop forte même si j’admets que c’était bien cuisiné (en même temps pour le prix…).
En rentrant, Patrick et Lukas ont sortis leurs fruits achetés au marché et nous on partagé un énorme plateau, yummmmmmy !
Le lendemain, je suis partie seule à la découverte de ce joyau qu’est Kashan. Rien n’est plus satisfaisant que de se balader dans les rues de cette ville désertique et d’atterrir soudainement au bazzar, de s'y perdre et de se retrouver près de magnifiques caravansérails, d’y découvrir un café caché et d’y déguster un espresso aux arômes persans.
Je me suis laissée perdre dans le bazaar ; c’est ce que je préfère. Entre deux étals, j’ai découverts de magnifiques mosquées et les plus beaux plafonds de caravansérails que j’aie vu jusque-là. Appareil photo en main, je me suis baladée dans la ville, essayant de capturer le charme et la beauté de Kashan et son calme bruyant.
Après un marchand de poisson et la très belle tombe de quelqu’un d’important, je me suis dit qu’il était temps de retrouver les suisse-allemands. En rentrant, je suis passée entre les ruelles à la recherche d’un restaurant et suis tombée sur un hôtel - qui malgré ce que Google maps assurait, n’avait pas de restaurant - et y ai rencontré la très belle Azar. Professeure de français à l’université de Kashan, elle s’exprimait quasi parfaitement dans ma langue maternelle et était très intéressée par mon voyage. Elle m’a offert un thé et je suis restée là à discuter. Elle m’a donné rendez-vous le lendemain, pour rencontrer ses étudiants et répondre à leurs questions.
Je devais y aller, j’avais une excursion de prévue avec les suisse-allemands. Comme je n’avais toujours pas mangé, je me suis contentée de fruits achetés sur la route et les ai rejoint.
Ensemble, nous partons à bord d’un 4x4 et accompagnés de notre chauffeur du jour, en direction d’une mosquée.
Ce premier arrêt est éblouissant, c’est juste magnifique. Je dois porter un chador pour visiter les mosquées et me retrouve donc avec un drap sur moi ; peu pratique. Nous restons un moment à admirer cet énorme édifice, puis repartons à bord de notre 4x4 en direction du désert.
Nous roulons à tombeau ouvert et passons un poste de police, près d’une base militaire. On surveille même qui entre dans le désert dans ce pays.
La route change, le gravier et le sable se mélangent, mais la vitesse ne se réduit pas. Soudain, une voiture arrive en face, elle roule à contre-sens et fonce droit sur nous. Notre chauffeur l’aperçoit au dernier moment et ne réussit pas à l’éviter complètement. Nous nous fonçons dessus et l’aile gauche de la voiture prend un sacré coup. Les roues sont détruites. L’autre voiture a lavant de la voiture détruit. Sur cinq personnes, personne n’avait de ceinture - c’est comme ça en Iran et les airbags sont inexistants. Personne n’est blessé, ni chez nous, ni dans l’autre voiture. C’est un miracle. Nous je comprenons pas comment c’est possible.
Nous sommes sous le choc. La voiture est inutilisable, des débris jonchent la route. Notre chauffeur appelle la police. Il nous appelle son frère pour que l’on continue notre excursion. On lui dit que l’on peut témoigner à la police, mais il insiste pour que l’on parte en voiture avec son frère.
J’avoue ne pas être malheureuse de ne pas croiser la police.
Sin frère n’a pas de 4x4, mais une simple voiture. Il roule encore plus vite et change de voie au fil de ses humeurs. Si la route n’est pas assez plate, il roule sur l’autre voie - ça permet de garder sa vitesse, vous comprenez. Cette voiture-co a des ceintures que nous nous empressons d’attacher. Le taxi roule bien trop vite et je suis complètement stressée tout le trajet. Il roule n’importe comment et je ne peux m’empêcher de penser qu’avoir un second accident dans la même journée et pour les mêmes raisons serait vraiment stupide.
Nous arrivons finalement aux dunes. Je suis en nage, mais pas à cause de la chaleur iranienne. Je sors de ce cercueil ambulant et suis ravie de presser le pas vers les dunes. Les derniers rayons de soleil sont là, ils nous attendaient. Le désert nous entoure. Splendide.
En repartant, on croise quelques dromadaires et faisons une séance photos avec eux.
Nous reprenons la route pour une vingtaine de kilomètres et atteignons le lac salé ; une étendue de sel. Nous y rencontrons un vieux couple autrichien et buvons un thé servi par les chauffeurs qui ont toujours plus d’un tour dans leurs coffres.
On repart pour Kashan, toujours avec la même vitesse. Nous dépassons plusieurs camions remplis de sel. L’autoroute s’offre à nous, pas moins dangereuse que le désert. Je suis fatiguée de cette conduite insensée. Soudain, Für Elise résonne dans la voiture, le son est fragmenté, digne d’un film d’horreur. C’est une boîte à musique du chauffeur. De temps en temps dans le trajet, quelques notes s’échapperont, au fil des freinages d’urgence.
Nous arrivons enfin à Kashan affamés. Notre chauffeur nous fait découvrir le meilleur Kebab de la ville - et le moins cher - et nous ramène à bon port. Que d’émotions. Nous retrouvons notre pote autrichien et passons une chouette soirée autour d’une tasse de thé et de fruits coupés.
Le lendemain matin, je pars retrouver la professeure de français. Ses étudiants ne sont pas disponibles aujourd’hui, elle est toute désolée. Je ne comprends pas la situation et me dis que y’a qu’en Iran où tu peux envoyer un message à ta prof d’université pour lui dire que tu es trop occupé pour venir à son cours. Peu importe, nous discutons un moment et elle me fait visiter son hôtel. Elle m’offre en souvenir une sous-tasse à l’effigie de Allbeki (ou c’est ce que j’ai compris). Elle me demande un souvenir de ma part en retour. Je n’ai rien avec moi et ne trouve que mon chouchou à lui laisser. Elle l’installe sur le tableau de souvenirs et me demande d’y laisser un mot. Jolie rencontre.
Je pars ensuite visiter les anciens bains et une ancienne maison. Le lendemain, je pars avec les suisse-allemands pour Isfahan en taxi, avec un arrêt dans un petit village traditionnel, Abyaneh.
Une fois encore, mieux vaut apprendre tout cela quand on sait que tout a bien fini! Mais sinon, que de splendeur s! Ce pays est fascinant! Et tellement beau!