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Photo du rédacteurLouise Perriard

La Paz

Dernière mise à jour : 13 juin 2023

A mon arrivée, Manon me propose d’aller boire un verre avec des francophones quelle a rencontrées. Ni une ni deux, nous nous retrouvons dans un joli bar avec vue sur la ville. Pizza et Moscow mule au programme (même si le serveur a désespérément tenté de me vendre son fameux cocktail “El Diablo”, bien moins bon que son excellent Moscow mule).


Pour ces quelques jours, Manon a un programme tout prêt pour nous (enfin de base elle ne savait pas que je serais là aussi). Le matin, nous embarquons à bord d’un taxi pour la vallée de la lune. Décidément, les vallées de la lune se trouvent à chaque coin de rue en Amérique du Sud ! C'est superbe.


De retour à La Paz (et en bus cette fois), nous tentons sans succès de trouver une place dans le fameux restaurant semi gastronomique “Cocina popular boliviana”. A défaut, nous nous tournons vers un excellent restaurant vietnamien, quoique un peu trop épicé à mon goût (en même temps y’avait deux piments sur le dessin du plat..).












Manon me fait aussi découvrir un super magasin de vêtements fait main et nous craquons toutes les deux pour un top ; comme ni le sien, ni le mien ne sont à notre taille, la vendeuse prend nos mesures et nous donne rendez-vous pour la semaine prochaine : elle nous coudra des hauts à notre taille !


L’après-midi, on s’en va découvrir le musée ethnographique qui est rempli de masques et de vêtements traditionnels encore portés aujourd’hui. En Bolivie, les femmes Aymara, Quechuas et d’autres groupes indigènes portent pour la plupart l’habit traditionnel. Les colons espagnols forçaient à l’époque les femmes locales à porter des jupes bouffantes, symboles de discrimination. Les femmes indigènes se sont appropriées cette tenue, appelée cholita et les jupes colorées sont désormais portées fièrement. Chaque région du pays a sa propre tenue. Bien sûr, un héritage inca se retrouve dans la tenue, mais la colonisation espagnole a modifié cela et ce que l’on appelle aujourd’hui tenue “traditionnelle” est telle qu’elle est du fait des colons espagnols et de leurs lois (le chapeau par exemple (borsalino) vient tout droit d’Europe). On dit que les colons avaient commandé des chapeaux pour les mineurs anglais mais qu’ils se sont trompés dans leur commande ; ces chapeaux trop petits sont arrivés sur les têtes des indigènes. Aujourd’hui, la position du chapeau sur la tête d’une femme à une importance : s’il est droit sur la tête, elle est mariée, s’il est de travers, elle est célibataire et s’il est mis derrière, c’est que “c’est compliqué”.


A l’époque, le terme “Chola”, désignant ces mêmes femmes indigènes, était très péjoratif. Elles se sont approprié le mot et on utilise désormais le mot “cholita” pour les désigner. En espagnol, le suffixe “-ita” s’utilise pour rendre quelque chose de petit ou pour désigner quelque chose avec tendresse.


Lors de la colonisation espagnole, les cholitas n’avaient quasi aucun droits et étaient par exemple interdites d’entrer dans les transports publics.


Heureusement, les choses ont changé et continuent d’évoluer. Les femmes se battent pour leur droit depuis les années ‘60 au moins, mais l’élection d’Evo Morales, premier président indigène du pays, a changé bien des choses. Une révolution indigène s’est effectuée et les indigènes sont désormais égaux en droit devant la loi. Un nouveau drapeau flotte désormais à côté du drapeau bolivien : le Whiphala, emblème et symbole sacré des peuples andins.


Revenons à nos moutons.


Caille Apolinar Jean


Après notre visite au musée, on se prend un café sur la très esthétique Caille Apolinar Jean, une rue toute colorée.


Le soir, je m’en vais boire un verre avec toute une équipe de cyclistes. Helena et moi se suivons sur les réseaux sociaux et on réalise que l’on est dans la même ville ! Elle m’invite alors à boire une bière avec des américains et danois (presque) tous cyclistes. On passe une très chouette soirée tous ensemble. Au milieu du tas, un irlandais tout ce qu’il il y a de néo-colon qui tient une certaine fierté à être le manager du bar secret de la Paz, le bien connu bar à cocaine. Grand soupir de soulagement quand il est parti rejoindre une fête dans la ville pour nous laisser à nos histoires de vélo.


Avec Manon, on va aussi visiter la Vallée “de las animas”, une vallée de formations rocheuses faisant penser à des esprits. La légende dit qu’il s’agit d’âmes pétrifiées. Pour arriver à ce lieu mystique, on tente de prendre un bus, mais aucun des minibus ne semble passer par là, malgré les informations qu’on nous avait donné. On finit donc par prendre un taxi, nous sans d’abord refuser le prix de l’un d’eux : 30 dollars. On sens sort pour 80 BOB (9.- CHF) pour effectuer la dizaine de kilomètres qui nous sépare de notre randonnée de la matinée. Notre chauffeur de taxi n’est pas commode et il me fait comprendre que les histoires qu’on entend sur la conduite bolivienne ne sont pas toutes fausses. En arrivant en Bolivie, je m’étais dit que les gens exagéraient et que la conduite ici n’était pas si terrible que ça. Notre chauffeur rivalise presque avec la conduite iranienne et je suis bien tendue pendant le trajet. Quand il fait le geste de la Croix avant de dépasser par la droite et à toute vitesse une voiture, je me demande si on arrivera seulement à la vallée. Ça monte beaucoup, et arrivé à trois kilomètres de l’entrée de la vallée, notre chauffeur nous demande 20 BOB de plus que prévu. Sur le principe, je ne suis pas d’accord et comme en plus il a failli nous tuer deux-trois fois, c’est un nom catégorique. Il se plaint qu’il n’a plus beaucoup d’essence, mais Manon et moi tenons bon. Il nous laisse donc au milieu de nulle part. Nous sommes énervées et bien embêtées. Manon a le génie de regarder sur IOverlander s’il n’y a pas un sentier pas loin et BINGO ! Nous commençons donc notre petite randonnée sur un sentier plus ou moins marqué et rarement emprunté. Très vite, nous sommes à court de souffle, car nous sommes au-dessus de 4000m. Le chemin s’efface et nous partons à l’aventure. La vue est splendide. Nous redescendons quand la falaise commence à trop s’approcher de nous.













En rentrant, on passe d’abord se prendre une crêpe et une gaufre. Comme Manon ne termine pas sa crêpe, elle la ramène à Hugo qui vient de rentrer de son ascension du Mont Potosi. Manque de bol, il y a une bactérie dedans et ils tombent tous les deux malades. Mes deux acolytes sont hors-service toute la semaine. Heureusement, j’ai une fenêtre en face de leur chambre pour leur faire coucou, et je les vois pour leur amener du riz ou de l’eau.


Les voyant ne rien faire me donne envie de ne rien faire. Je m’offre donc le luxe de me reposer, vraiment. C’est très très chouette. Je me fais aussi masser pour 10.- CHF ; un massage incroyable à l’huile et aux pierres chaudes. En sortant, je suis complètement stone (rapport aux pierres chaudes ?). Mais ce n’est pas l’heure de rentrer, puisque la famille française qui m’a repêchée au bord de la route dans le Sud Lipez est à la Paz ! On se donne rendez-vous dans le pub de la ville et on passe la soirée ensemble. Trop chouette de les retrouver !


Je m’offre aussi le luxe de restaurant bistronomique, accompagnée d’Helena, la cycliste espagnole et de José, un Franco-espagnol qu’elle a rencontré la veille lors d’un walking tour. On mange extrêmement bien et presque trop. La sieste appelle après un gueuleton pareil ; je suis épuisée. On parle en espagnol/anglais/français puisque les trois avons des connaissances dans les trois langues. On se prend un café avant de se dire au revoir et je vais retrouver mon lit pour les heures à suivre. Le soir, Manon et Hugo jouent aux téméraires et on se fait un resto ensemble.




Le dimanche, je vais me perdre dans les rues du marché de El Alto et le soir, Manon se joint à moi pour aller assister à un catch de Cholitas. En effet, le catch a gagné en popularité chez les femmes indigènes quand elles ont réalisé que c’était une manière de se battre pour leur droits. Seuls les hommes se battaient à l’époque et voilà que les cholitas rentraient dans l’arène et battaient à plate couture les hommes ! De fil en aiguille, le catch leur a permis de regagner leur place dans la société (première cholita au sein du gouvernement, etc.) ! Sur place, je retrouve Matji et Blanka qui se remettent de la tourista (comme 90% des touristes à la Paz).


Le catch lui-même est plus une pièce de théâtre que du catch, mais c’est intéressant à voir. Après, on va pas se mentir, c’est fait pour les touristes. On passe une chouette soirée quand même en encourageant les femmes qui se battent contre les hommes. Tout est spectacle et personne n’est vraiment blessé (quoique certaines “chutes” doivent faire plutôt mal).







Comme je n’ai rien de mieux à faire le lendemain, je retourne me faire masser au même endroit que la dernière fois et rejoins Manon et Hugo au même resto bistronomique que l’autre jour (Cocina Popular Boliviana). Par chance, le menu a changé et c’est une nouvelle expérience culinaire qui m’attend (même si j’aurais bien aimé retrouver la tarte au chocolat).



En fin d’après-midi, on retrouve nos t-shirts avec Manon, ajustés à notre taille. Pour fêter ça et comme c’est notre dernière soirée ensemble à la Paz, on va se boire des cocktails dans notre bar préféré et y manger des pizzas. Notre barman nous fait nos cocktails favoris et, alors que l’on s’apprête à rejoindre Hugo qui est déjà rentré à l’hôtel, le serveur nous propose un shot (vu la taille, c’était plutôt un verre) d’un cocktail mystérieux. On ne saura pas ce qu’il y avait dedans, mais c’était excellent (et fort), et visuellement très stylé puisqu’il a flambé le cocktail sous nos yeux.


On rentre un peu trop joyeuses et le lendemain, nous nous disons au revoir puisque nous partons chacun dans des directions différentes. Je laisse Alba à l’hôtel et la troque contre le bus. Je reviendrai donc à la Paz, mais suis un peu triste de quitter ce chouette hôtel et son personnel (la dame de l’hôtel m’appelle Signorita à tout bout de champ, je trouve ça adorable).


Au petit-déjeuner, je rencontre Savannah, une française qui travaille depuis six mois en Bolivie, dans une refuge pour animaux sauvages. Elle a deux semaines de vacances et part aussi à Copacabana. On s’en va donc prendre le bus ensemble !

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2 Comments


Yves Perriard
Yves Perriard
Jun 12, 2023

Magnifique comme toujours !

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Quelle merveille de lire ton récit, de s'instruire et s'émerveiller avec toi! merci!

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