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Photo du rédacteurLouise Perriard

Le train, cet écosystème

La journée commença tôt. A 6h du matin, le réveille sonnait déjà et me fit réaliser que je n'avais quasiment pas dormi (apparemment faire une sieste en milieu d'aprèm n'aiderait pas). Direction la gare de Budapest pour une nouvelle journée de train. On souhaite en effet rejoindre la Bulgarie rapidement, où nous attendent deux amies que j'ai rencontrées l'été passé à Salzburg. Le temps de prendre un pique-nique - et le choix n'était pas bien grand, et c'est bien dommage- et nous embarquons à bord de notre nouvelle maison pour la journée.


Ce voyage commence aux numéros 105 et 106 : nos sièges selon notre réservation. Là, rencontre avec un individu de type hongrois, de langue hongroise et de tempérament peu courtois. Celui-ci nous fait très clairement comprendre - et on peut l'en féliciter car c'était pas forcément gagné (on n'arrive même pas à dire bonjour en hongrois)- qu'il ne veut pas de nous dans son compartiment.


Entendu, on se déplace. Puis un premier contrôleur vient nous rendre visite. Appelons arbitrairement ce personnage Almòs (un nom hongrois selon internet, eh oui, je fais mes recherches). Almòs s'en fout de notre réservation et de nos billets aussi dans le fond. Par contre, il veut pas que l'on reste là.


On pourrait croire que l'on s'est déjà fait virer deux fois, mais on s'est simplement fait sauver notre journée par nos deux bonhommes ; on ne le savait juste pas encore.


On prend finalement place au bout d'un autre wagon (nous n'en bougerons plus, rassurez-vous). A côté de nous, un couple d'allemands voyageant en interrail. Ils viennent de Fribourg (in Brisgau) et ont tout juste terminé leur bachelor en Sciences-Po. Ce couple fort sympathique sera ce qui nous permettra de garder un lien avec l'Europe de l'ouest pendant tout ce trajet. Budapest-Craiova en train, c'est un dépaysement assuré. Une légende dit qu'Almòs aurait rassemblé tous les non-hongrophones ensembles dans ce wagon - mais qui croit encore aux légendes de nos jours ?


Soudain, le train nous secoue un bon coup et s'immobilise. Nous sommes en gare de Mezoetür, et le train ne semble pas vouloir repartir. Aucune annonce, ni dans le train, ni en gare. Almòs, qui semble avoir pitié de nos, mais à la manière des hongrois, vient vers nos amis allemands et nous et nous annonce simplement : "Maschin Kaputt", d'un accent hongrois qui sonne étrangement russe à mes oreilles peu habituées aux langues de l'Est.


L'horloge tourne, les moteurs moins. Le train ne semble pas vouloir repartir. Une femme sort promener son chien. Les hongrois ont apparemment compris instinctivement que l'on s'arrêterait un moment. Ils semblent habitués et compréhensifs. Personne ne demande rien au contrôleur. Ici, on allume sa clope et on se tait, personne pour gueuler sur le personnel.


Les petits suisses que l'on est ne se suffisent toutefois pas de l'unique information reçue. D'un regard désespéré, on cherche des yeux une bonne âme qui voudrait bien nous raconter à quelle sauce on serait mangés. L'homme-au-t-shirt-bleu, comme on l'a nommé, nous annonce sereinement "the train is broken" du même accent qu'Almòs. Bien. Dans le wagon, on entend un anglophone se présenter "I'm an engineer, but I don't know how to repair machines".





Après plus de 2h d'attente, une locomotive de remplacement arrive. Nous sommes presque surpris de la rapidité de l'arrivée de cette dernière.


Voilà que la machine repart. Pas bien vite, mais on est en route.


Là, on réalise que tous les wagons de derrière on disparus. On est content de s'être fait déplacés. Trois wagons circulent avec la locomotive ; il n'existe pas tant de monde motivé par une traversée de frontière en 13h. Bizarre.


On comprendra qu'ici, les wagons fonctionnent selon l'offre et la demande du moment. D'autres seront ajoutés le long du trajet.


Notre retard ne sera jamais rattrapé. Il sera même creusé un peu. De quoi nous permettre de découvrir la faune qui nous entoure : un homme qui ne voulait pas lacer ses chaussures, un homme mystérieux accompagné de sa valise qui refusait d'une part de s'asseoir et d'autre part de lâcher sa valise. Le mystère de ce type est intact, pour notre part, on le soupçonne de vouloir se cacher de la police. Ses coups d’œil au plafond laisseraient même croire qu'il cherchait une échappatoire en cas d'urgence.


Le type mystérieux en image.


Un voyage en train hongrois, c'est aussi entendre le contrôleur (pas Almòs, un autre) crier sur un couple de manière vraiment soudaine et imprévue. On a compris - ou imaginé - plus tard que ceux-ci s'étaient retrouvés bloqués dans le train après avoir monté les valises d'une vieille pour l'aider. Quoi qu'il en soit, le contrôleur était flippant.


On a aussi rencontré beaucoup de policiers qui n'ont ont demandé plusieurs fois nos carte d'identité ; on les soupçonne de ne pas avoir l'habitude des cartes suisses et allemandes, car ça leur a pris du temps. Et puis, on nous a bien contrôlé trois fois nos billets de train, mais jamais de manière intégrale.


Finalement voyager en train, c'est aussi venir à la rencontre des habitudes du pays. En l’occurrence, fumer entre les wagons semble être toléré. Il serait faux de dire qu'il s'agit d'irrespect. Les fumeurs ont, en effet, commencé par sortir pour allumer leur précieux tabac, puis le trajet s'allongeant, ils se mettaient aux portes lors des arrêts. Après...ils ont fini par carrément fumer à l'intérieur. Heureusement, une porte nous séparait encore du fumoir - porte qui a donné du fil à retordre à 100% des passagers.


Le coucher de soleil depuis la vitre du train nous laissait admirer ses reflets sur le Danube, seul gardien qui nous séparait de la frontière Serbe. Les champs de blé et de tournesol avaient enfin laissé place à la forêt et au fleuve.


Vers 23h, Craiova nous accueillait dans la nuit. Ses chauffeurs n'en avait cure de nous voir survivre à la traversée du passage piéton. Notre journée allait finalement bientôt s'achever dans notre chambre d'hôtel réservée à l'avance. Ce n'était pas sans compter le portail fermé qui nous bloquait, ultime obstacle nous séparant du sommeil. Nous avions été prévenus, il fallait appeler en arrivant. Seulement, cela ne semblait pas marcher. Pas de sonnette non plus, évidemment. Juste un énorme portail. Ma patience touchant sa fin et nos coups de poings résolus sur le métal ne fonctionnant pas, je décidai d'escalader la barrière. Ni une ni deux, je trouvai le bouton pour ouvrir le sésame et nous voici entrés.


Nous avons encore eu de la peine à trouver la réceptionniste. Malgré la barrière - de la langue cette fois-, on comprit assez vite qu'elle ne comprenait pas comment on était entré. Oups, elle a moyen apprécié. Notre roumain n'étant pas plus élaboré que notre hongrois, c'est au téléphone et dans un mélange d'italien, d'anglais, de roumain et de français qu'on nous expliqua les quelques informations qu'il nous fallait encore.


Morphée nous tendait ses bras. Demain, la Bulgarie nous tendrait les siens.


C'est l'aventure.



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