Je soupe dans mon chouette hôtel de sel, mais comme j’oublie de mentionner que je ne mange pas de viande, je me retrouve avec un plat typique bolivien ; de la viande et de la soupe (et encore de la viande). C’est plutôt bon et ça ne fait au moins le plein de protéines ; tant mieux. Je rencontre une équipe qui fait un tour en 4x4 et qui dort une nuit dans mon hôtel. Des américains, tchèques, brésiliens, colombiens et français qui apprennent à se connaître ; la recette d’une soirée animée. Le tchèque nous fait goûter un alcool maison qu’il a ramené de Prague et le français se moque de tout ce qui touche à la Suisse : on se demande où les gens vont chercher les clichés !
Même si je fatigue vraiment de ces blagues pas drôles qu’on me fait sur les suisses, je passe une très bonne soirée agrémentée d’anecdotes sur le Brésil, histoires de voyages et Histoire tout court.
La nuit est très fraîche et je me mets dans les sacs de couchage en plus des couvertures ! Le matin, j’ai droit à un petit-déjeuner avec des tranches de viande, car j’ai une fois encore oublié de dire que je m’en mangeais pas. Je me motive à aller visiter la nécropole du village, seule attraction touristique ici. Il n’y a personne sur place et j’appelle le numéro collé sur la vitre. L’homme au téléphone me dit que je peux rentrer sans payer ; il a la flemme de venir juste pour moi. L’entrée est ouverte, parfait. Je me balade entre les momies (ou plutôt ossements) et je suis entourée de champs de quinoa.
Julian m’ayant donné son contact gps Garmin, je peux suivre l’avancée de mes acolytes. Je vois qu’ils viennent d’arriver à San Juan ! Je retourne donc dans le village et tombe très vite sur trois vélos. Ils sont très surpris de me voir arriver et m’avouent avoir fait des paris afin de savoir si j’arriverais à Uyuni ou autre part. Même pas besoin de prendre un bus d’Uyuni, on m’a lâchée ici ! Ils sont épuisés car ils ont du pousser les vélos sur deux jours. « Comme t’as bien fait de faire du stop »! Je sens presque une pointe de jalousie, certains auraient préférés ne pas vivre ces deux derniers jours de vélo… Je ne me sens pas particulièrement reposée mais le contraste est flagrant ; ils sont sur les genoux. On fait le plein de provisions chez « mamacita » comme l’a appelé Julian au plus grand plaisir de cette dernière (ça veut dire petite maman mais ça veut aussi dire belle femme). J’offre les bières du soir et je propose à l’équipe de manger dans mon chouette hôtel. Ils ne se font pas prier et - meme s’ils camperont ce soir - nous nous retrouvons dans mon hôtel de sel. Je cherche la cheffe de l’établissement mais ne trouve que le jeune serveur. Il semblerait que dans ce village, les hommes n’aient réponse à aucune question et soient pas très malin. Je lui demande s’il est possible de manger tout de suite, mais il me renvoie à la Dueña - la cheffe. Je trouve ensuite la cuisinière et rebelote, elle ne sait pas ; il faut demander à la dueña. Déjà pour activer ma carte SIM, j’avais essayer de demander de l’aide aux jeunes garçons de l’hôtel ; ils n’ont pas réussi (je me demande en fait s’ils savaient lire).
Je m’en vais donc à la recherche de la Boss. Je tombe enfin sur elle et elle nous fait signe de nous asseoir. Il faudra attendre un moment avant l’heure du repas, ça tombe bien j’ai des bières et des cacahuètes pour l’apéro.
En Bolivie, il semblerait que les femmes gèrent tout, mais vraiment tout. Les femmes tiennent les magasins, les auberges, cuisinent, font la lessive, s’occupent des enfants, ont réponse à tout. Les hommes ? C’est à peine si on les voit. A part conduire des voitures, ils semblent absent de la vie de société. C’est très étrange.
Les trois autres se trouvent une place du village pour y camper tandis que je profite d’une dernière nuit de luxe à l’hôtel. Le lendemain, je suis surexcitée: on va au Salar d’Uyuni !! C’était sans compter sur la fatigue terrible de mes acolytes qui ne sont toujours pas prêts à 11h. « On a le temps pour une glace, non ? ». Ah oui, ok est pas encore partis.
Ils ne veulent pas pour autant prendre un jour de repos, par contre ça traîne… beaucoup. Petit passage à l’école du village pour y prendre de l’eau qu’il nous faut filtrer, rencontre avec des profs de gym qui prêtent leurs javelots à Blanka qui nous fait une petite démonstration et schlager allemande en fond issue de mon excellente playlist de camp de skis.
A mon plus grand soulagement, nous finissons par donner nos premiers coups de pédales de la journée. Pas sure que l’on atteigne le Salar aujourd’hui. La route n’est pas toujours très bonne et le sable nous demande parfois de pousser les vélos quelques mètres. C’est très fatiguant pour le mental, mais… on va au Salar ! Le Salar d’Uyuni, c’est le plus grande désert de sel au monde. Il est situé à 3700m d’altitude et regorge de lithium (selon wiki, il contient la moitié des réserves de lithium de la planète). Il fait plus de 10500 m2 et contiendrait suffisamment de sel pour offrir à ça Hun des habitants de notre planète l’équivalent d’une voiture de sel.
C’est là-bas qu’on se dirigeait ; mon plus grand rêve depuis que j’ai décidé de partir en Amérique du Sud à vélo.
A 10km de l’entrée du Salar et alors que le soleil se couche, Matji s’arrête et nous annonce que son porte bagage est cassé. Mais pas d’inquiétude, Matji sort vis, ficelles et serflex et commence une réparation. Avec les autres, on décide qu’il est trop tard pour espérer continuer et on commence à planter les tentes à côté des champs de quinoa. Finalement, Matji nous annonce qu’il a réparé son porte-bagage. En voyant le résultat, Blanka s’esclaffe « c’est vraiment le genre de réparations qu’on ferait en Hongrie”. Personnellement, je suis impressionnée qu’il ait trouvé un moyen de faire tenir des bouts d’aluminium cassés en deux ensemble.
Le soir, je cuisine ma quinoa de la région achetée à San Juan et on admire un ciel étoilé exceptionnel. J’en profite donc pour faire quelques photos.
Le lendemain, rebelote ; je suis surexcitée ! Cette fois, c’est sûr, on va au Salar !
Nous franchissons les dix kilomètres nous séparant de ce dernier avec un vent de face épuisant et arrivons à un petit village. Sur un panneau, nous lisons “hoy hay empanadas”. Cri de joie. Nous achetons littéralement tous les empanadas de la dame et tout le pain qu’elle a à vendre. Problème, ce sont des empanadas aux patates, légumes et… viande de lama.
J’ai tellement envie d’empanadas que je fais une énième exception à mon régime pescetarien et goûte à cette viande très commune en Bolivie. A ceux qui la connaissent, je fais la même tête que Claire quand elle découvre l’intérieur d’un poisson dans les “films de quand on était petit”. Une tête bien dégoûtée quoi. C’est vraiment pas bon et la texture de la viande de lama est immonde. Je mange mes autres empanadas en prenant soin d’enlever les bouts de viande à l’intérieur. La gentille dame nous offre un café étrange qui semble être un mélange de thé et de café très sucré. On est ravis. On repart le ventre rempli et le cœur léger pour nos premiers coups de pédales sur le mythique Salar. Contrairement à ce qu’on nous a raconté, ça roule vachement bien et le Salar est tout sec. Nous nous badigeonnons de crème solaire et j’enfile la part de lunette protectrice ; le salar c’est dangereux pour les yeux ! On a un énorme sourire sur le visage et on roule à toute vitesse.
Pour se diriger, on pointe le gps en l’air et désignons une montagne à suivre. Nous souhaitons faire un arrêt sur l’une des îles du Salar ; like d’Incahuasi, connue pour ses grands cactus (cacti ?).
En chemin, nous nous arrêtons faire des photos mythiques à l’aide d’un dinosaure en plastique trouvé à l’entrée du Salar. La créativité est à son pic et la bonne humeur aussi.
On repart ensuite pour finalement camper à quelques kilomètres de l’île. Le sel est trop dur pour planter les sardines mais heureusement, il n’y a pas de vent ! Je ne mets pas la deuxième toile de tente pour m’endormir sous les étoiles. Le coucher de soleil est magistral et la Voie lactée apparaît bien vite, majestueuse. Un moment gravé dans la mémoire.
J’assiste au lever de soleil avec délectation. On se cuisine une omelette pour le petit-déjeuner, assaisonnée de sel du Salar. On fait le plein de nos salières en piochant sur le sol avec nos couteaux-suisses et on se remet en route pour l’île. Moins de trente minutes après, nous nous arrêtons déjà pour découvrir cette île de cactus. Nous sommes super bien accueillis par un couple qui tient une tienda et qui nous concocte des soupes de maïs. Nous signons le livre souvenirs des cyclistes et repartons direction le nord en faisant un petit détour pour prendre quelques photos des cactus de l’autre côté de l’île. Nous mettons cap sur un grand volcan et avons un rythme fou ; c’est comme rouler sur du goudron !
A quelques kilomètres de la fin du Salar, arrêt obligatoire pour LA photo du Salar. C’est une tradition entre cyclistes qui daterait même d’avant l’arrivée du mot “bikepacking”. Je parle bien sûr de la photo sur le salar tout.e nu.e ! Blanka m’aide à me prendre en photo pendant que les deux gars font pareil dans leur coin. Le sol fait mal au pied et le soleil tape très fort. Un moment assez inoubliable.
On se pause un long moment et on finit par repartir en direction de Coqueza, un petit village à la sortie du Salar. C’est la qu’on plante la tente, face à cette splendide étendue de sel, quelques lamas et des flamands roses profitant d’une petite lagune sur la fin du Salar. Nous découvrons avec euphorie une échoppe qui vend des fruits et légumes, des œufs et du vin ! C’est gueuleton ce soir !
Enfin la photo que j'attendais! elle concrétise la réalisation de ton rêve d'Amérique du Sud! les photos sont toujours magnifiques! J'imagine bien celle qui aurait pu être prise quand tu as goûté la viande de lama 😂!
Génial!!! Photos de malade.. et les empanadas de lamas ahahaha
Tellement beau ! Et cette photo nue sur le sel !