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Photo du rédacteurLouise Perriard

Ruta de las lagunas - J. 4-7

Au matin, le soleil illumine les geysers de sa lumière. C’est splendide. Nous nous baladons chacun dans le champs de geysers et finissons par prendre le petit-déjeuner. Je ne sens pas tant le mal d’altitude pour dire que nous sommes à 4920m. Serait-ce la fin de mes supplices ?








Nous finissons par ranger nos affaires sous des airs hongrois plutôt rap que traditionnels. Nous enfourchons nos vélos et entamons une bonne montée qui nous fait sortir du cratère. Cette montée fait tout de suite sortir le mal d’altitude en Blanka et moi et nous galérons très vite. Je me sens de nouveau très faible et le mal de tête me reprend. Avec Blanka, nous poussons nos vélos sur les derniers mètres et les garçons nous annoncent que nous n'avons « que » de la descente aujourd’hui. C’est bien évidemment faux puisque l’Amérique du Sud n’est que montagnes russes. Nous subissons les montées et descentes du Sud Lipez et je ne me sens toujours pas bien. La descente ne semble pas tant m’aider et l’équipe file à pleine vitesse pendant que je galère derrière. Il y a plusieurs raisons à cela. D’abord, les trois autres sont déjà (très) bien acclimatés, ensuite, les hongrois ont des vélos avec suspensions tandis que l’autrichien a un fat bike (et ne ressens donc pas les rochers sur lesquels on passe). Je suis donc bien à la traîne et n’ai que peu de plaisir sur la descente. Quand je les rattrape enfin, ils s'apprêtent à repartir tout de suite, comme d’habitude. Je suis à bout ai j’ai besoin de boire. J’essaie de me convaincre que je dois m’arrêter pour moi et les laisser filer à leur rythme mais c’est très stressant d’avoir trois personnes qui m’attendent. Je me force donc à me dépêcher et me mets dans le rouge alors que mes réserves sont déjà bien entamées. Je finis par leur avouer que je me suis vraiment pas bien et Julian me propose de manger. Je n’ai en effet quasi rien mangé depuis trois jours, conséquence du mal d’altitude. Julian étant un (vraiment) très grand mangeur, il s’inquiète de ma nutrition. J’écoute son conseil et, en effet, je me sens mieux. Blanka, comme à son habitude, lance un « on repart ? » à peine après avoir fini son repas. Ben d’accord.


Nous finissons par arriver sur une descente infinie et je laisse les trois fusées s’envoler en bas pendant que j’essaie de profiter des paysages et freine à mort pour ne pas que mes bagages sautent du vélo (ainsi que ma propre personne). Si la route était en excellent état avant les geysers, cette descente est vraiment horrible et nous nageons dans les gros cailloux et le sable. Le vélo s’immobilise parfois de manière très inattendue me faisant risquer une énorme chute. Un 4x4 s’arrête et nous offre des bananes et de l’eau ; les touristes en jeep sont vraiment tous très sympas avec nous ainsi qu’admiratifs. C’est aussi rassurant d’avoir un minimum de trafic alors que nous sommes au milieu du désert. Les 4x4, je les aime bien. Et puis, ça booste aussi l’égo que de faire à vélo ce que des 2x4 ne peuvent faire !






Arrivés en bas de la descente, nous devons faire un détour de quelques kilomètres pour atteindre l’unique ravitaillement de la route. Je n’ai absolument pas besoin d’acheter quoi que ce soit ayant vraiment pris beaucoup trop de nourriture au débit et n’ayant quasiment rien consommé ces derniers jours. Je suis avec peine mes trois collègues et m’enfonce dans le sable. C’est éreintant de devoir poser un pied à terre pour ne pas tomber dans ce sable-gravier. Je respire très fort. Cette journée n’est vraiment pas drôle. Je rejoins l’équipe et vois Matjias s’effondrer sur le sable mais se reprenant très vite dans un fou rire. On traverse un petit ruisseau avec les vélos et arrivons enfin au village. Je m’arrête et n’arrive pas à reprendre mon souffle. Je suis en manque d’oxygène et refais une sorte de crise d’asthme sans asthme. Cette fois, cela dure cinq très longues minutes et l’équipe s’inquiète pour moi. Je leur annonce que je ne vais pas continuer. Je suis à bout et dois m’écouter. Nous entrons dans le magasin alors que je sèche mes larmes et on s’assoit par terre entourés de chips et de bières. Je me sens mieux (grâce à la bière ?) et accepte un peu à contrecœur de les suivre au moins jusqu’au mirador suivant, à 7km, près de la lagune Colorada. Nous effectuons ces derniers kilomètres et arrivons dans la tempête près de la lagune. Le soleil est en train de se coucher, c’est juste splendide. Nous rencontrons un couple de St-Gall voyageant en Van et nous essayons avec peine d’installer les tentes dans la tempête. Un local finit par arriver vers nous et nous propose de dormir dans le mirador un kilomètre plus loin ; il y tient un restaurant et nous assure que nous y serons protégés du vent. Blanka et Matji ne sont pas très convaincus (nous avons pas tout saisi de ce que le mec nous a dit) et je pars donc en éclaireuse au mirador voir ce qui nous attend. J’assiste les yeux émerveillés au coucher de soleil sur la lagune avec flamands roses et lamas à l’horizon. Pas le temps pour des photos, il faut que l’on sache où l’on dorme ! J’arrive alors au mirador et le gars me montre le deuxième étage de ce bâtiment surplombant la lagune, il le dit que l’on peut y dormir sans problème. Nous y sommes effectivement protégés du vent, mais un côté est ouvert ; il n’y fait donc pas plus chaud que dehors. Je retourne vers le d’autres pour leur signifier que c’est un petit paradis et que l’on y passera une bonne nuit. On pousse les vélos sur le petit chemin pédestre et on établit campement au mirador. Julian et moi dormons à la belle étoile sur les bancs relativement confortables du mirador (pas besoin de sortir le matelas et la tente !), tandis que les deux autres frileux plante la tente dans le restaurant. Je mets exceptionnellement mes deux pantalons et m’enroule dans toutes mes couches pour la nuit. J’ai très vite trop chaud, et ouvre les yeux pour découvrir un ciel merveilleux avec quelques flamands roses qui se distinguent sur l’eau ; quel spectacle !















Au matin, je me réveille avec la lumière du soleil et découvre les premiers rayons éclairer l’eau et les flamands par centaines. Quelques étoiles sont à la traîne et rendent le spectacle encore plus beau. « Ca valait le coup, encore une fois » dis-je à l’équipe à leur réveil. Mais cette fois, je maintiens, je n’irai pas à vélo au prochain spot de camping. Je dois m’écouter, il faut que j’apprenne de mes erreurs passées et je ne peux pas forcer mon corps plus longtemps. Blanka a alors une brillante idée : essayer de faire du stop jusqu’à l’hôtel desierto et pédaler avec eux le lendemain. J’aime cette idée et l’on est tous contents que je ne parte pas en voiture jusqu’à la fin de la route des lagunes aujourd’hui. Nous admirons les flamands roses un moment et je les laisse filer à vélo les trois. Je reste seule au mirador en espérant que les prochains touristes aillent dans ma direction et acceptent de me prendre avec Alba. Je rencontre deux guides en 4x4 qui l’annoncent aller en direction du Chili. Mince. L’un d’eux me dit que les touristes pour le nord n’arrivent que dans l’après-midi ici, l’autre me dit que ceux allant au nord ne passent pas par ce mirador… que faire ? Je fais une séance shooting avec quelques lamas au loin et décidé de faire neuf kilomètres à vélo pour rejoindre le mirador nord de la lagune. Là-bas, les touristes allant dans ma direction devraient s’y rendre !





Je reprends à contrecœur le vélo et arrive proche du mirador, à un petit shop. Qui vois-je là ? Mes trois cyclistes préférés ! Ils se sont posés manger quelques chips achetées à ce shop bienvenu sur la route. Ils sont tout étonnés de me voir la et je leur raconte mes aventures. Ils me proposent de les suivre mais ma décision est sans appel, je dois le reposer aujourd’hui ! Je les laisse repartir en espérant ne pas avoir fait une grosse bêtise. Aucune voiture n’est passée dans cette direction aujourd’hui et il est déjà 12h. Je suis à côté de la sortie/entrée du parc national et décide d’aller voir un des rangers. Un violent mal de ventre me prend et je suis à nouveau dans un terrible état. Quand est-ce que ce put*** de mal d’altitude va-t-il s’arrêter ? Je demande au ranger s’ils pensent que des 4x4 passeront par la dans la journée. Il ne me semble pas très futé et n’est pas très convaincu de ça. Peut-être tard dans l’après-midi. Il me dit que j’ai plus de chance d’aller sur l’autre route de cet unique croisement de la route des lagunes, route qui rejoins Uyuni. Ça ne m’arrange pas du tout puisque les amis m’attendront à l’hôtel desierto sur la route et que je veux faire le Salar avant de rejoindre Uyuni (le faire à vélo et non en 4x4 !). Je ne sais pas du tout quoi faire et je me tiens le ventre depuis trente minutes. Je me demande ce que je fous là.


Je me résigne à aller demander au mec du shop s’il veut jouer au taxi pour m’emmener à l’hôtel desierto, a 2h de route en voiture de là. Le gars me propose un prix dérisoire, presque celui que payent les touristes pour faire la lagune entière en 4x4. Je refuse donc, convaincue que je trouverai une autre solution. La fille (?) du gars écoute la conversation et parle relativement bien anglais ce qui le permet de m’exprimer plus correctement. C’est donc non. Je retourne vers mon ranger débile et m’assieds par terre, résolue à attendre une voiture. Finalement, la fille du mec du shop revient et semble s’inquiète pour moi. Je me sens de moins en moins bien et suis prête à payer le prix demandé. Je le lui annonce et elle me répond qu’en fait son père n’a tout simplement pas le temps, d’où ce prix dérisoire. Elle m’annonce qu’elle va parler aux dangers voir s’ils peuvent faire quelque chose. Ces derniers n’ont pas de voiture, mais il semblerait qu’un camion passe plus tard pour délivrer de l’eau à un shop a 15km de là. Je reprends espoir. Elle prend les choses en main et donne des consignes aux rangers ; demander à chaque voiture qui s’arrête de me prendre. Je la remercie infiniment et retourne dans l’attente. Le fameux camion jaune finit par arriver et sans perdre une minute, je monte à bord. On met Alba dans l’énorme benne derrière et c’est parti ! Après une bonne quarantaine de minutes, on dépasse les autres cyclistes qui sont soulagés de me voir passer. Le camion me dépose à Piedra de Arbol, lieu touristique où ils livrent de l’eau. Ils n’iront pas plus loin. Je m’installe donc et me cuisine un riz en attendant les trois autres. Ces derniers arrivent bien plus vite que prévu et je n’ai toujours pas croisé une seule voiture qui va dans ce sens pour me prendre. Mon mal de ventre a disparu et je me sens mieux. Je n’ai que peu d’espoir de me faire prendre en stop et me décide à me joindre aux autres pour les 35km restants. Alors que nous nous apprêtons à partir, je vois pleins de 4x4 arriver, mais c’est trop tard, j’ai dit que je suivrais les autres à vélo… !





Ils prennent un rythme de fou que je n’ai même pas sur le goudron et nous roulons à 16km/h. Je m’efforce de jouer au chat et la souris avec eux mais me sens suffisamment bien pour le faire. J’ai du plaisir à rouler, enfin ! C’est un rythme bien trop élevé pour moi, mais je réussis à les suivre malgré tout et avec le sourire. J’ai l’impression de me retrouver petite à courir après mes frères et sœurs en disant « attendez-moi ! ». Nous roulons à toute allure (et je ne suis pas nécessairement la dernière !) jusqu’à atteindre une sorte de champ de patates sans patates. Nous sommes à 10km de notre destination du jour (hôtel desierto). Je leur annonce avoir lu que ce sont les pire kilomètres de ripio de toute la route des lagunes mais ajoute « avoir de la peine à y croire vu comme ça roule bien ». Que nenni ! Après quelques mètres, le sable reprend le dessus ainsi que les cailloux et je suis forcée de descendre du vélo à plusieurs reprises. Julian est convaincu que c’est parce que j’ai osé dire que la route n’était pas si terrible qu’elle l’est devenue.




Pire ripio ever

Nous galérons en silence de notre côté et le soleil se couche à toute allure. Nous voyons l’hôtel devons nous, mais ne réalisons pas tout de suite qu’il reste encore huit kilomètres à parcourir.. à la vitesse de la marche ! Quel enfer ! Seul Julian se balade dans ce champs avec aisance, ses énormes roues le lui permettant. Je suis à bout, mais cette fois, je ne suis au moins pas la seule. Pour couronner le tout, ça monte ! Quelle énorme galère. Je dois sortir la frontale, car le soleil s’est couché. Je franchis finalement les derniers mètres, toujours en poussant le vélo, et rejoins l’équipe frigorifiée. Nous rencontrons alors le manager de l’hôtel qui nous remonte instantanément le moral : nous pouvons camper gratuitement derrière l’hôtel et nous pouvons utiliser les douches (chaudes !) gratuitement. Il nous propose un repas du soir pour 20 dollars (très cher pour la Bolivie mais que l’on est littéralement au milieu du désert, et au vu du standing de l’hôtel, je crois que c’est en fait une offre en or). J’ai très envie d’accepter et Julian semble aussi d’accord, mais les hongrois n’ont pas le même budget que nous et semblent hésiter. Nous finissons par jouer le repas au papier, cailloux, ciseaux et Julian gagne par miracle. Nous mangeons donc dans le restaurant de l’hôtel ce soir-là ! Nous ne mangerons pas seuls puisque nous rencontrons deux jeunes français à vélo qui roulent dans le sens contraire ! Les six cyclistes que nous sommes nous prenons une grande table et ne passerons pas inaperçus. En effet, la journée éreintante que nous venons de passer nous a mis dans un état proche de l’ébriété et le fou rire nous attend au coin de la rue. Nous passons une soirée incroyable à déguster un excellent repas et à s’échanger des anecdotes de voyage ainsi que des informations sur la route. Les deux français nous assurent que la route du lendemain est bonne et « c’est que de la descente ». Parfait.


Nous testons un nouveau mot Bolivien appris « yapita » qui est une façon de demander un plus pour un service payé, en l’occurrence, du rab’. Nous recevons donc double ration de soupe à notre plus grand plaisir.


Le soir approchant à grand pas, chacun se rentre dans sa tente alors que je profite encore un peu du wifi (car oui, il y a du wifi !! Ô luxe hôtelier). Alors que je suis seule dans la réception, l’un des managers vient me voir et commence à le taper la discussion. Il est vraisemblablement très intéressé par mon voyage et quand je lui annonce que je rentre me coucher, il me propose une chambre gratuitement dans l’hôtel. « Je n’ai pas l’habitude f’de faire ça et je ne peux ps la proposer aux autres, mais si tu veux, tu peux dormir dans l’une des chambres ! ». Je décline poliment étant solidaire avec mes amis cyclistes et n’étant pas certaine non plus des intentions du mec ; je ne veux être redevable de rien du tout.


Le lendemain, nous avons droit à un petit-déjeuner de roi et reines et ce, gratuitement ! En effet, l’hôtel nous offre les restes des petit-déjeuners des clients en 4x4. Incroyable ! Un pur régal. Nous nous challengeons de tout finir et réussissons sans trop de problème.


Nous repartons le ventre plein et un grand sourire jusqu’aux oreilles. Contrairement aux français, un jour de vélo facile mois attend ! Facile ? Euh… pas vraiment. Ça commence par une montée dans le sable très pénible où nous maudissons les deux français qui ont osé nous dire que la route était bonne. Ça continue par d’autres montées et une baisse de motivation aussi élevée que l’altitude à laquelle nous sommes. Finalement, la descente se laisse apercevoir, mais le sable et les cailloux ne nous quittent pas (des fans de Jaques Brel à tous les coups).





Je suis émerveillée par les paysages mais mentalement à bout ; cette route m’aura poussée jusque dans les tréfonds de mes limites. A mi-chemin, nous nous arrêtons pour pique-niquer (chips, krackers et ketchup ; les sacs de bouffe se vident et on laisse place à notre imagination pour se créer un repas sain). C’est reparti et mes fesses veulent à force de se reprendre les secousses des cailloux sur la route. Mentalement, ça s’empire encore (si c’est encore possible). Je suis à nouveau lien derrière n’ayant toujours pas de suspension pour filer sur les cailloux. Julian à pitié de moi et se fait des tours sur lui-même pour rester à ma hauteur. Ça m’irrite au plus haut point et j’essaie de lui faire comprendre gentiment qu’il ferait mieux de garder son rythme de croisière. Ma patience a atteint ses limites et je n’ai vraiment pas envie de sa pitié. Il me semble pas comprendre et je change de vocabulaire pour l’en persuader. Il essaie de rester encore mais un simple regard semble le décider à s’en aller devant. Merci.


Je me mets de la musique et essaie de recharger mes batteries sociales en même temps. Ça marche assez bien (merci à Billy Joël) et je finis la route de meilleure humeur. Le paysage est encore une fois splendide et les lumières de la fin de journée nous offrent des clichés merveilleux. Nous arrivons enfin à l'Eco Hôtel Flamenco, dernier spot de la nuit sur l’officielle route des lagunes (mais pas le dernier avant le prochain village). Les cyclistes précédents nous avaient vendus du rêve concernant cet hôtel : on s'attendait à avoir une chambre pour un prix réduit, des restes des tours etc. Rien de tout ça pourtant. On nous a laissé camper dans le garage en plein travaux (c’est à dire entre des fenêtres cassées et des bouts de lits) et on nous a gentiment fait comprendre de ne pas trop s’approcher de l'hôtel. Sympa. On aurait mieux fait de camper un kilomètre avant face à la lagune !







Épuisée, je me mets vite au lit. Le matin, je ne me sens une fois encore pas bien, et vraiment faible. J’ai l’impression d’être la fragile de service, du coup, je ne dis rien et me force à me mettre en route avec les autres. Ils me dépassent vite et je trouve toute seule avec mes pensées. J’en peux vraiment plus et je sens que j'ai atteint le bout de mes réserves. Pour couronner le tout, mon câble de plateau lâche, m’empêchant ainsi de changer de plateau. Je n’ai plus d’énergie et me mets à marcher à côté du vélo. Je rejoins finalement les autres qui m’attendent. Voyant ma mine dépitée, ils comprennent vite que ça ne va pas. Je feins que le problème vient de mon câble cassé, mais mon câble pêté, je m’en fous complètement. Je veux juste dormir. Julian et sa (parfois) insupportable bonne humeur constante me rassurent tout de suite ; il a un câble de rechange avec lui. Moi qui pensais avoir enfin une bonne excuse pour faire du stop…


Non, je suis décidément contente que l’on puisse réparer mon vélo, mais cette fois, je sais qu’il faut que j’arrête de pédaler. Ma santé est en jeu.


J’aide Julian à changer mon câble (et j’apprends à le faire en même temps) et je leur annonce que je ne bougerai plus d’un pouce. Habitués à ce discours insupportable de ma part, ils essaient de me motiver, mais je sais que je dois m’arrêter. Je m’écoute donc (il était temps) et me poste au bord de la route pendant que les trois mousquetaires repartent, un peu inquiets pour moi. Je les rassurent et leur promets que je trouverai une solution pour les rejoindre à San Juan, d’où nous prévoyons de traverser le Salar d’Uyuni.


Un 4x4 s’arrête alors mais va dans l’autre sens, ils semblent avoir tous pitié de moi et me proposent de monter à bord, mais retourner au Chili et à 4920m d’altitude ne me semble pas vraiment être une bonne idée et je refuse donc poliment promettant à des inconnus que je trouverai une solution. Un second 4x4 passe et rebelote. Finalement une jeep arrive dans ma direction. Je l’arrête, mais le chauffeur m’annonce à contrecœur que la voiture est pleine. Il me dit qu’une voiture pas tout à fait remplie devrait arriver plus tard. Ça me rassure un peu. Le soleil tape très fort et je suis postée au bord de la piste, dans le désert. Difficile de ne pas se demander ce que je fous-là. Mais pas le temps de remettre toute ma vie en question, car une autre jeep arrive ! Je l’arrête elle aussi, mais c’est encore une voiture pleine… quelques minutes plus tard, un autre 4x4 s’arrête. Le chauffeur m’annonce que c’est un tour privé, pas de chance pour moi. J’ai les larmes aux yeux. Qu’est-ce que je vais devenir ?


Mais la jeep s’arrête quelques mètres plus tard et je comprends qu’une grande discussion s’est lancée entre ses occupants. Le chauffeur fait marche arrière et me dit que les touristes qu’il guide ont accepté de me prendre. Je rencontre alors une famille française merveilleuse qui m’accueille dans leur tour du Sud Lipez. Je ne crois pas qu’ils se rendent compte à quel point je leur suis reconnaissante. Karine et Thierry sont les parents de Romain et Clara. Tout de suite, je suis entourée de plein de chaleur humaine et de rires ; je suis en famille. Ce n’est pas la mienne bien sûr, mais ça fait beaucoup de bien. Thierry a fait une carrière militaire en France et le parle du Liban où il a servi. C’est une famille super cultivée et c’est hyper agréable de discuter avec eux. Ils viennent de commencer leur tour du monde de huit mois en famille ! Je suis prise comme exemple pour leur enfants ; quelque chose dans ces mots ou signifiant cela : « si mes enfants partent en tout du monde comme ça plus grand, j’aurai réussis ». Ils sont ravis de m’accueillir pour ces quelques heures de trajet et je suis honorée de leur accueil. J’ai pour quelques heures un guide et lui pose quelques questions sur la région. Nous nous arrêtons même à un mirador où tout ce beau monde va manger. J’ai des pâtes dans mon sac, mais n’ai pas le temps de le dire que je suis invitée à leur table et de toute façon, « il y a toujours trop ». Quelle générosité ! Je me régale et rigole beaucoup des histoires de Romain et Clara, les deux enfants de la famille, brillants.


Je rencontre aussi d’autres français venant des 4x4 pleins s’étant arrêtés pour moi. On fait connaissance, tout le monde est super sympa. Cette journée qui avait très mal commencé, est en fait géniale ! Je me sens beaucoup mieux et je suis aux anges. Quelle chance d’être tombée sur cette famille ! Et puis, le hasard fait bien les choses puisqu’ils habitent et à quelques cent kilomètres de Neuchâtel, de l’autre côté de la frontière ! La maman a même un accent jurassien !


On repart dans notre super 4x4 et propose ma musique pour sauver cette équipe de la redondance des morceaux du chauffeur. Eux ont l’impression que j’ai sauvé leur trajet, moi j’ai l’impression qu’ils m’ont sauvée. Tout le monde est donc content ! Nous nous arrêtons une deuxième fois. Nous sommes dans le petit salar de Chiguana et il y a au milieu de cette étendue de sel, des rails de voies de chemins de fer ! Notre petite équipe repart jusqu’à San Juan, porte d’entrée du Salar d’Uyuni. C’est là que nos chemins se séparent, car je vais m’y trouver un hôtel pour attendre les trois autres cyclistes. Je dis au revoir à cette belle famille et espère les recroiser en Bolivie.


San Juan est un petit village fantôme. Fantôme ? Non ! Un petit hôtel de sel m’ouvre ses portes après que j’ai demandé à chaque passant où trouver un lit pour la nuit. Il n’y a pas de panneau sur la porte mais derrière les murs se trouvent plusieurs chambres toutes simples et une grande salle à manger. Je négocie une nuit, un repas du soir et un petit-déjeuner et profite de ne rien faire jusqu’à la tombée du soir. Le bonheur, malgré le froid glacial qui règne dans ma chambre. Je m’offre même une douche chaude !


Salar de Chiguana

San Juan

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2 Comments


Mais quelles aventures... galères, beauté, bonté... rires, pleurs... que d'émotions!

Et que d'émotions à te lire...

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Yves Perriard
Yves Perriard
May 26, 2023

Grandiose !! Et merci à Karine et Thierry !!!

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